La chloroquine contre la COVID-19, ça marche ou pas?  Pourquoi sommes-nous si frileux à l’idée de l’utiliser? L’urgence mondiale nécessite-t-elle une procédure exceptionnelle? Toutes les réponses à ces questions dans les lignes qui suivent.  Bonne lecture!

La chloroquine et la possibilité qu’elle soit un traitement contre la COVID-19 font beaucoup parler depuis quelques semaines dans l’actualité.

Et avant d’aller plus loin, je veux spécifier que quelques jours dans cette période particulière de notre histoire peuvent paraître comme une éternité. Je serai donc très prudent dans ce billet car ce qui est vrai aujourd’hui pourrait être déconstruit demain.

Ce que les médias internationaux relaient aujourd’hui, c’est que la Chloroquine pourrait être un traitement qui éliminerait la COVID-19.

Alors la chloroquine fait-elle partie d’un traitement adéquat OUI ou NON?

Pour être considérée adéquate, on doit démontrer que

1) son effet est supérieur à celui d’un placebo;

2) que les bénéfices à son utilisation sont supérieurs à ses risques.

Et démontrer ces 2 points n’est pas évident.

LA CHLOROQUINE, C’EST QUOI?

La chloroquine est un médicament antipaludique développé au siècle dernier.  Son dérivé, l’hydroxychloroquine, est commercialisé sous le nom de Plaquenil au Canada et en France.  On l’utilise aussi couramment pour soigner le lupus et la polyarthrite rhumatoïde.

Et peut-être la propriété qui nous intéresse le plus ici, la chloroquine a des propriétés antivirales.  Mais ces propriétés ont été observées seulement in vitro, c’est-à-dire en éprouvette.

Des expériences faites sur des cellules, en laboratoire, démontrent que la chloroquine inhibe la réplication du virus à l’origine de la COVID-19.

En fait, la chloroquine a des effets antiviraux démontrés in vitro, mais les expériences ont démontré l’échec de ces effets in vivo, donc sur des animaux vivants.  Et dans l’histoire, on a testé la chloroquine comme traitement sur des individus souffrant de maladies respiratoires virales, mais sans succès.

Le consensus chinois, publié il y a quelques semaines, atteste de l’efficacité de la chloroquine comme traitement contre la COVID-19, mais ne fournit malheureusement aucune donnée de recherche brutes. 

Il est donc impossible pour la communauté scientifique internationale de vérifier ce qui est avancé par la Chine et de bien soigner les malades.

Mais un nouvel acteur est entré en scène cette semaine…

LE PROFESSEUR DIDIER RAOULT

Le professeur Didier Raoult publie le 20 mars dernier une étude intitulée : La chloroquine est-elle efficace dans le traitement de la COVID-19?

Mais qui donc est Didier Raoult?

Un infectiologue français de renommée internationale.  Un super chercheur sur les virus. Un champion scientifique.  Mais un humain aussi.

Cette étude du Professeur Raoult a été très critiquée et voici les principaux points problématiques :

  • L’échantillon de l’étude est petit; seulement 26 patients initialement et 20 à la fin. 

Donc statistiquement, c’est faible, on préférerait un plus grand échantillon.

  • On ne connaît ni l’état clinique, ni la charge virale initiale des patients.  Pas plus qu’à la fin d’ailleurs.  Il est donc difficile de mesurer l’amélioration réelle de la charge virale au cours de l’étude.
  • Le suivi des patients devait durer 14 jours, mais les données présentées s’arrêtent au 6e jour.  Pourquoi?
  • Les patients à l’étude ont été répartis en 3 groupes, mais tous les groupes ne se trouvaient pas sur le même site.  Les données ont donc été prises par différents intervenants, peut-être selon des critères différents.

D’autres problèmes, comme le fait que le traitement à la chloroquine n’ait pas été testé contre un placebo, ou encore que l’éditeur en chef ayant publié l’étude travaille dans le même institut que le professeur Raoult incitent à la prudence…

DE L’IMPORTANCE DE LA NUANCE

La valeur de l’étude du professeur Raoult est remise en question par la communauté scientifique internationale.

Mais les médias qui s’emballent au sujet de la chloroquine font un pari très risqué.

Dans le meilleur des cas, l’étude est reproduite et les résultats sont positifs : les médias ont été porteurs d’espoir au sein de la population.

Dans le pire des cas toutefois, l’étude est bidon : les médias ont donné de faux espoirs, et le moral est au tapis.

CONCLUSION

Quel est le risque acceptable ici?

A) Attendre plus de preuves de l’efficacité de la chloroquine et perdre des vies humaines au cours de l’attente?

B) Traiter à la chloroquine maintenant et s’apercevoir de son inefficacité, voire de sa dangerosité trop tard, et perdre des vies humaines?

Et si les médias, en s’emballant ainsi, convainquaient les gens de s’automédicamenter à la chloroquine? Car n’oublions pas que le produit est déjà disponible en pharmacie, et nous savons déjà que la ligne est mince entre la dose thérapeutique de chloroquine et une surdose mortelle.

Alors le fait de porter cette nouvelle à la une est-il responsable de la part de nos médias?

La bonne nouvelle est que le traitement à la chloroquine sera évalué au sein d’essais cliniques de grande ampleur au cours des prochains mois.

Nous devrions donc être vraiment fixés quant au traitement à la chloroquine d’ici la fin de l’été, mais pour l’instant : PRUDENCE!

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