On place beaucoup d’espoir dans l’arrivée des nombreux vaccins pour mettre un frein à la pandémie actuelle.

Parmi ces vaccins, deux seront distribués à grande échelle ici au Québec au cours des prochaines semaines.  L’un est proposé par la compagnie Pfizer et l’autre, par Moderna.

Ces 2 vaccins ont ceci en commun qu’ils sont des vaccins à ARNm (prononcer ARN messager). 

Dans la population, plusieurs se demandent s’ils devraient ou non, recevoir le vaccin.  Parmi ceux qui préfèrent ne pas recevoir l’injection, la peur et l’inquiétude sont parmi les principales raisons données.  Et pour cause, peu d’information d’une part, et une tonne de désinformation d’autre part circulent partout sur le web.

Or, il est possible d’être vacciné contre la peur.  Ce vaccin qui libère de la peur, c’est l’éducation!

Les lignes qui suivent vous donneront l’information nécessaire pour éliminer plusieurs de vos peurs en regard à la campagne de vaccination qui s’amorce.

-Pourquoi dit-on que le vaccin pourrait altérer nos gènes? 

-Comment un vaccin qui prend habituellement des mois voire des années à développer a-t-il pu être préparé aussi vite? 

-Si le vaccin n’est efficace qu’à 95%, qu’en est-il des 5% pour lesquels il ne fonctionne pas? 

-Pourquoi faut-il absolument conserver le vaccin à des températures très froides? 

Toutes les réponses à ces questions dans les lignes qui suivent.  Bonne lecture!

Qu’est-ce qu’un ARN?

Une molécule d’ADN.

Toute l’information importante pour que notre corps s’acquitte de ses fonctions est stockée sur de longues molécules appelées ADN (Acide DésoxyriboNucléique). La molécule d’ADN a une structure célèbre : celle de la fameuse double hélice. 

Cet ADN est enroulé de façon très serrée en petits bâtonnets appelés chromosomes.  Ces chromosomes sont entassés à l’intérieur du noyau de chacune de nos cellules, bien à l’abri. 

Pour s’acquitter de ses fonctions, la cellule a besoin de synthétiser de longues molécules appelées protéines.  Et pour construire une protéine, la cellule a besoin d’un plan de construction. 

L’ADN fait la transcription de l’ARNm, destiné à produire une protéine.

Tous les plans de construction de toutes les protéines sont archivés sur nos molécules d’ADN.  L’ADN est donc en quelque sorte la bibliothèque de toute l’information génétique. 

Lorsque la cellule a besoin d’une protéine, la molécule d’ADN repère dans ses archives le plan qui lui est associé et transcrit ce plan sur une autre molécule : l’ARN (Acide RiboNucléique).

Tel un messager, cette molécule sera transférée hors du noyau dans le cytoplasme de la cellule, pour aller rejoindre un ribosome qui pourra utiliser ce plan pour fabriquer la protéine (chaîne polypeptidique).

L’ARNm est une molécule très fragile qui n’existe que pendant quelques heures tout au plus.  Lorsqu’elle s’est acquittée de sa tâche, elle est tout de suite dégradée par la cellule.

Qu’est-ce qu’un vaccin à ARNm?

Les vaccins proposés par Pfizer et Moderna sont des vaccins à ARNm.

Les informations génétiques du virus de la Covid-19 sont connues depuis presque 1 an. 

Protéine S du virus, son « portrait-robot ».

Nous savons reconnaître la séquence associée la protéine de spicule du virus (aussi appelée protéine S).  Cette protéine est très importante car c’est en quelque sorte le « portrait-robot » du virus.  Si notre corps parvient à déceler cette protéine étrangère, il entamera la séquence immunitaire. 

Le vaccin à ARNm injecte dans nos cellules le brin d’ARNm permettant la synthèse de la protéine S du virus.  Nos cellules s’emploient donc à fabriquer la protéine de pointe du virus! 

Lorsque cette protéine est détectée par le système immunitaire, une réponse s’enclenche. Cette réponse peut entraîner des effets secondaires : fièvre, maux de tête, nausées, etc.  Mais le vaccin ne peut pas provoquer la maladie, car seule une protéine du virus est répliquée, pas le virus lui-même. Cette réponse immunitaire nous mènera vers l’immunité adaptative contre la maladie.

Simple non?  Pas tant que ça…

Pourquoi le vaccin doit-il être conservé au froid?

Comme expliqué précédemment, la molécule d’ARNm est très fragile et ne survit pas très longtemps à l’intérieur du corps.  On doit donc la conserver au froid, pour éviter sa dégradation. 

De plus, afin de pénétrer dans nos cellules, l’ARNm a besoin d’une enveloppe de lipides, de gras si vous préférez.

Or, nous savons tous que les lipides sont sensibles à la température eux aussi.  Si on laisse du beurre sur le comptoir, il ramolli. De même, en conservant le vaccin au froid, on préserve l’enveloppe lipidique de l’ARNm.

Comment a-t-on pu développer un vaccin aussi rapidement?

Le virus de la Covid-19 est appelé SRAS-Cov-2, car il est le deuxième de sa lignée.  En 2002, le premier coronavirus du SRAS avait frappé.  On avait alors lancé des recherches pour développer un vaccin contre ce premier virus.  Mais comme l’épidémie avait été contrôlée, le vaccin n’a jamais été nécessaire. 

Lorsque nous nous sommes penchés en début d’année sur le développement d’un vaccin pour cette seconde version du SRAS, un certain travail avait déjà été accompli, ce qui a accéléré les choses.

De plus, ce type de vaccin ne nécessite que la synthèse d’un brin d’ARNm, ce qui est une procédure assez simple.  La complexité ici n’est pas dans la préparation du vaccin, mais dans son stockage et son transport, car on doit le garder au froid.

Que signifie un taux d’efficacité de 95%?

Dans les essais cliniques du vaccin, tous les participants n’ont pas reçu la même injection.

Environ 20 000 sujets ont reçu le vaccin, et 20 000 ont reçu un placebo. 

Parmi les vaccinés, 8 seulement ont développé la maladie, contre 192 qui avaient reçu le placebo.  Donc en présumant que 192 personnes auraient aussi dû attraper la maladie dans le premier groupe, mais que seulement 8 l’on effectivement attrapé, le nombre de cas vaccinés efficaces est de 184 (192-8).

On obtient ainsi un taux de 184/192 ou autour de 95% d’efficacité. 

Pourquoi le taux n’est pas de 100%? Difficile à dire.  Le vaccin étant très fragile, peut-être que la dose n’était pas suffisante pour conférer une immunité complète.  D’autres statistiques nous en apprendront davantage.

Pourquoi parle-t-on de thérapie génique? Le vaccin peut-il altérer nos gènes?

Notre précieux ADN, bien à l’abri dans le noyau de nos cellules, est parfois soumis à des mutations.  Ces mutations, ce sont des changements accidentels dans la séquence de certains nucléotides. 

C’est un peu comme faire une faute de frappe en retranscrivant un texte, une lettre est alors changée par une autre.  Généralement, cette faute de frappe ne change pas le sens du texte, voilà pourquoi la plupart des mutations n’ont pas vraiment d’effet.

Lorsqu’on parle de thérapie génique, on modifie volontairement une séquence de nucléotides sur l’ADN.  On modifie volontairement le sens du texte en agissant sur une séquence spécifique.

Voici 7 arguments pour lesquels on ne peut parler de thérapie génique avec le vaccin à ARNm :

  1. L’ARNm ne survit pas longtemps dans le cytoplasme et est rapidement dégradé.
  2. L’ARNm n’a pas de moyen de pénétrer dans le noyau, là où est archivé l’ADN.
  3. Pour en être capable, il devrait d’abord être rétro-transcrit en ADN, ce qui nécessite des enzymes particulières.
  4. S’il parvenait à survivre assez longtemps, à être rétro-transcrit et à pénétrer dans le noyau, il devrait encore réussir à s’intégrer à l’ADN.
  5. Même s’il s’intégrait, la modification n’aurait fort probablement aucun effet.
  6. Même si elle avait un effet, cet effet n’aurait pas été prévu, ce qui élimine d’office le concept de thérapie génique.
  7. Même si une cellule était génétiquement modifiée, elle ne pourrait pas passer cette modification à la descendance car ce ne sont pas des cellules germinales (reproductrices) qui reçoivent l’ARNm.

Comme on peut voir, le concept même de thérapie génique est farfelu lorsqu’on parle de vaccin à ARNm.

Conclusion

On peut comprendre que certaines personnes aient peur de la vaccination.  Car dans cette période inédite, la campagne de vaccination comporte plusieurs éléments d’incertitude. 

Les peurs sont très souvent irrationnelles.  En apprendre davantage sur les araignées change notre perception à leur endroit.  Elles sont alors un peu plus fascinantes et un peu moins effrayantes. C’est la même chose pour le vaccin.

Non, on ne peut tout savoir. On ne saura jamais tout.  Mais en savoir un peu plus nous aide à éliminer nos peurs. 

En espérant que cet article vous aura aidé à apprivoiser votre peur de ces nouveaux vaccins.

4 Comments

  1. Yan décembre 16, 2020 at 3:38 am - Reply

    Ee, non. En savoir plus sur les araignées ne les rend pas plus sympathiques…

    Good job François!!! Très à propos comme toujours.

    • François Asselin décembre 26, 2020 at 3:53 pm - Reply

      Peut-être pas dans tous les cas en effet! HaHa!
      Merci!

  2. Christine décembre 21, 2020 at 11:50 am - Reply

    Bonjour François
    Quelle est la différence entre les deux vaccins proposés.
    Car il parait que une des questions posées est 《êtes vous immunosupprimé dans le questionnaire de pfizzer》
    Y aura t il des risques pour les patients immunosupprimés ou au contraire comme pour la grippe, c’est un plus d’être vacciné pour nous.
    Très bon texte merci

    • François Asselin décembre 26, 2020 at 4:14 pm - Reply

      Bonjour Christine,
      La différence principale entre les 2 vaccins réside dans la façon de les entreposer. Le vaccin de Pfizer doit être maintenu à des températures plus froides que celui de Moderna. Pour ce qui est des personnes immunosupprimées, on déconseille généralement les vaccins vivants. Mais ce vaccin n’est pas vivant, il ne s’agit que d’une molécule de ARNm. Les études préliminaires d’incluaient pas de personnes immunosupprimés, alors on ne sait pas ce qui se passe avec ce vaccin. Mais tout porte à croire que les bénéfices sont bien supérieurs aux risques, si jamais il y en a (des risques), et on en doute. Alors voilà! Merci du commentaire! 🙂

Laissez un commentaire